2020

Par quel chemin entre-t-on chez soi, sans en connaître ni le sol ni le toit? En 2020, j’ai eu l’impression de marcher jusqu’à moi. J’ai rencontré une maison moulée sur mon corps et je me suis déposée en elle comme en moi-même. Il n’y a pas d’itinéraire pour arriver jusque-là. Personne n’a en main la carte du ventre. Il fallait, pour l’atteindre, savoir à quoi je ressemblais moi-même, autrement je n’aurais pas su distinguer ma Sauvagine des autres lieux. 

Je ne sais pas combien de temps cette vieille dame m’habitera. Si elle restera toujours mon intérieur, mes palissades. J’ignore combien de temps ses sols abriteront mes racines. Mais je sais que pour arriver jusqu’à elle, il a fallu que je vieillisse, que je me déleste, et loin derrière je vois mon bagage déposé en petit tas, de Montréal à Paris et haut dans le parc des Grands-Jardins, à Repentigny, Baie-Saint-Paul et Québec, à Banff, Vancouver, Tremblant. Depuis mon hystérectomie et l’écriture de Blanc Résine en 2018, j’avançais jusqu’ici. Et je ne le savais pas. Des fois les chemins les plus ardus…

En 2020, bien consciente du bruit, des douleurs, des peines, des faims de toutes sortes qui déchiraient le monde, j’ai traversé l’année sur une route à part, à côté d’un beau survenant qui traçait sa voie parallèle. Nous nous sommes confinés dans un château grand comme une salle de classe; sans internet mais avec un poêle et une corde de bois demi-sèche; toutes armes, toutes armures tombées. Quand il a fallu reprendre la route, le dernier droit jusqu’à chez moi, nous avions l’énergie cumulée pour ouvrir des jardins, planter des arbres et réinventer les sols. Pour accueillir bêtes et musique – chiots, guitare, piano –, pour bâtir des mondes de mots, pour se tricoter un quotidien à notre image. Et l’énergie encore pour trouver une autre maison, la sienne de guerrier, parce que deux comme nous peuvent inventer toutes les manières de se vivre. 

C’est un parcours inédit, on ne sait pas toujours vers où on avance, mais Jean-François m’aide à escalader les roches tandis que je tiens les branches pour qu’elles ne l’écorchent pas trop. Nos cœurs et nos corps parlent des langues accordées, le langage des libres, ce dialecte qui permet d’aimer l’autre sans jamais se perdre soi. (Se perdre une fois rendu, ça serait le comble!) 

En 2021, je vous souhaite d’avancer un peu plus vers vous-même, dans la bienveillance, la douceur et l’enthousiasme, en prenant soin du chemin des autres – à distance tant que nécessaire –, sans perdre le droit fil de vos pieds. 

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